Une expérience inédite alliant culture et plaisir ! La Cité de la Gastronomie a ouvert ses portes !
« Nous y sommes ! Pour célébrer le Repas gastronomique des Français inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’Humanité, Dijon a mis les petits plats dans les grands. Au kilomètre 1er de la route des Grands crus, la Cité internationale de la Gastronomie et du vin de Dijon ouvre ses portes ! » écrit dans la préface de la brochure explicative le maire de Dijon, François Rebsamen.
Ce 6 mai 2022 est à marquer d’une pierre blanche : l’inauguration de la Cité de la Gastronomie !
La cité est construite sur un site très ancien. Depuis l’an 1204 il est dédié aux soins et à l’hospitalier. Entre le port du Canal, le jardin de l’Arquebuse et la gare, cet immense espace est aménagé sur un terrain de 6,5 hectares. Il existait autrefois l’emplacement de l'ancien hôpital général, aux portes du centre historique et proche de la route des grands crus, voie royale pour découvrir les Climats du vignoble de Bourgogne, inscrits au patrimoine de l'Unesco.
Se cultiver, se former, se régaler... C'est le triptyque fondateur de la Cité de la gastronomie. De grandes expositions, l'école de cuisine Ferrandi-Paris, l'école des vins de Bourgogne, les commerces de bouche, la Librairie gourmande (*) et la cuisine expérientielle du Village gastronomique, la Cave et les restaurants du groupe Epicure, les 9 salles de Cinéma Pathé Dijon... Voilà ce que propose la Cité de la gastronomie !
Les 5 sens en action, apprêtez-vous à vivre une expérience gastronomique et culturelle unique !
Cité Internationale de la Gastronomie et du Vin - Dijon
The Cité internationale - Centre for gastronomy and wine in Dijon Art exhibitions, Ferrandi-Paris School, wine school, Restaurants, wine bar, gastronomic village... An experience dedicated to french
(*) « Je suis entrée dans le monde du vin sans autre formation professionnelle qu'une gourmandise certaine des bonnes bouteilles. » disait Colette, alors entrons dans cet espace aussi magique qu’une cave à vin, la librairie gourmande :
Depuis 1985, face au défunt siège du Figaro à Paris, se présentait l'échoppe la plus complète pour les amoureux de la gastronomie sous toutes ses coutures. La Librairie Gourmande était aux côtés des enseignants, professionnels de la gastronomie et amateurs de cuisine pour les accompagner chaque jour en leur proposant la plus grande offre de livres de cuisine et d’œnologie.
Sucré, salé, acide, amer, piquant… Aujourd’hui il y en a pour tous les goûts dans cette librairie dynamique et enjouée située à proximité des Grands Boulevards et de l'effervescence du Forum des Halles. Il faut dire que Deborah Dupont-Daguet, passionnée de cuisine, donne toute son âme à ce lieu où se bousculent chefs, étudiants, amateurs de bonne chère et autres collectionneurs de livres culinaires, rares et anciens ou actuels. Dans son domaine, c’est une des librairies les plus riches d’Europe ! Sa réputation mondiale n’est plus à faire.
Cette fois, la Cité de la Gastronomie lui a donné l'opportunité d'ouvrir une seconde boutique à Dijon. Deborah Dupont-Daguet espère que le succès sera également au rendez-vous : « C'est un domaine qui fonctionne bien, et surtout après les deux années que l'on vient de vivre, les gens se sont remis à cuisiner. »
Pour pouvoir donner ces conseils, la propriétaire s'entoure de vendeurs spécialisés en gastronomie. Six ont déjà été employés sur le site dijonnais. Bien sûr, la librairie aura aussi un rayon œnologie : « J'ai fait faire sur mesure un meuble avec des caisses de vin », raconte la propriétaire. C'est la première étagère que les clients verront en rentrant dans la boutique, à partir du 6 mai 2022.
Alors, bonne visite et... bonne dégustation livresque !
A Paris, la Librairie Gourmande : 92-96 rue Montmartre 75002 Paris.
Tél : +33 (0)1 43 54 37 27 - Email : contact@librairiegourmande.fr
Cité de la gastronomie de Dijon - la librairie gourmande
Please enable JavaScript to experience Vimeo in all of its glory. Cité internationale de la gastronomie et du vin - Dijon. A la découverte de la librairie gourmande qui prendra place au coeur du ...
« Lire, c'est boire et manger. L'esprit qui ne lit pas maigrit comme le corps qui ne mange pas » écrit Victor Hugo, à qui il est difficile de donner tort, surtout en ce moment où fleurissent les déclarations d'amour à la littérature, désignée meilleur viatique par ces temps troublés. Gastronomie et littérature sont intimement liées et entretiennent ainsi un dialogue fructueux avec le goût, toute époque confondue.
C’est pourquoi j’ai le plaisir de vous proposer une petite nouvelle, originale à souhait, dont l’auteur m’a fait la politesse de l’amitié.
Les trois fontaines
En décachetant l’invitation à cette fameuse journée gourmande, Jean Deloraine ne put s’empêcher de faire la grimace. Pour le prochain dimanche d’automne, il se voyait convié à une sortie gastronomique de premier ordre, en compagnie d’Antoine Lagarbure et de son groupe d’amis, tous lecteurs avertis du Guide Michelin et connaisseurs des meilleures toques dans un rayon de 25 départements. Le ton de l’invitation était bonhomme, le style vaguement chantourné, et le carton gaufré contenait une citation de Dodin-Bouffant qui fleurait le Troisième Empire, les boudoirs de la Belle Epoque.
Jean n’était ni un ascète, ni un disciple du docteur Bombard, ni un curé défroqué. Toutefois, il se tenait à l’écart de ces fureurs « gourmandes » devenues politiquement correctes depuis que la République les avait érigées en modes d’expression avant-gardistes, comme le vélo, le tag, la planche à roulettes et le tatouage derrière l’oreille. Il se méfiait instinctivement de cette restauration de haut niveau dans laquelle la littérature peu à peu se substituait à la cuisine et les gestes du vin à sa dégustation elle-même. Et toujours l’étonnait le fait que Lagarbure et ses amis faisaient parfois des centaines de kilomètres pour déguster « le coquibus aux écrevisses marinées dans le romarin », ou « le marcassin reconstitué dans son milieu et sa sauce aux champignons crus », ou mieux encore « le chapiteau de bœuf monseigneur débité sur son lit de girolles, de patates douces et de moutarde ».
En ce début de troisième millénaire, il repensait souvent à ce sénateur romain, un certain Gambrinus, qui pérégrinait le long des côtes d’Afrique en quête de langoustes toujours plus charnues, desquelles il se disait toujours déçu : à cette époque-là les Barbares étaient aux portes de l’Empire.
Il relut le carton d’invitation. Le repas aurait lieu chez César Troisfontaines, un double macaron situé quelque part dans les monts du Lyonnais, à bien trois heures de route d’ici. Le chef tirait son pseudonyme des trois vouivres de pierre qui crachaient de l’eau de source en plein milieu de son restaurant : une légende solidement implantée voulait qu’en ses jours fastes, César ordonnât que les fontaines crachent du vin à la place de l’eau, ce qui situait tout de suite la dimension culturelle et religieuse de l’endroit. La gouaillerie du chef français était célèbre jusqu’en Belgique et son chariot de pâtisseries (c’est encore ce qu’on prétendait) faisait venir aux femmes des rêves bovarystes et des soupirs indicibles. Les additions étaient pharaoniques, mais ce sujet était absolu tabou : le transgresser vous faisait passer pour un cuistre, un péquenot ou un réactionnaire de mauvaise compagnie.
Jean Deloraine finit par accepter, d’abord parce qu’il aimait bien Lagarbure, ensuite parce que l’idée de retrouver la belle Simonetta, vaporeuse à loisir et gourmande comme un chat de luxe, n’était pas faite pour lui déplaire. Il mit seulement comme condition qu’il ne voyagerait pas dans le mini-bus affrété par le trésorier, et qu’il utiliserait son automobile personnelle.
Vint le premier dimanche d’automne, sous une de ces lumières d’arrière-saison qui vous fait regretter de ne pas avoir passé votre vie entière dans le loisir et la contemplation. Passant aux environs de Solutré, il s’arrêta pour regarder la roche qui tombait sur les vignes comme un gigantesque couperet. Cette vision le laissa songeur et il fut malgré lui assailli de réflexions désabusées sur la transitivité impitoyable de l’Histoire, la contingence de la condition humaine ; tant et si bien qu’il s’égara sur les petites routes sinueuses de Beaujolais, et qu’il arriva sérieusement en retard dans l’établissement dirigé par César Troisfontaines. Aussi n’eut-il guère le loisir de profiter du jardin botanique, devant le regard froid du maître d’hôtel qui l’attendait sur le perron. Antoine Lagarbure ne lui fit pas de compliments, car le repas était déjà rien de moins qu’entamé, et tout le monde tança le pauvre Deloraine, coupable d’avoir failli au « coquetier d’huitres chaudes en guise de mise en bouche légère ». Que n’avait-il utilisé le mini-bus ? Comme un grand échalas vêtu de noir lui avançait sa chaise pour le placer à table, il faillit basculer en porte-à-faux, provoquant ainsi un bref incident. Pour comble d’infortune, il vit que Simonetta n’était pas ce jour-là de la fête : il en éprouva une contrariété qui lui sembla brusquement hors de proportion et l’irrita insidieusement. Une suée maligne lui brouilla les paupières, pendant que Lagarbure agitait un grand verre de Pomerol dans lequel il identifiait « des fruits noirs compotés avec une touche de fougère et une note de fumaison ».
Je suis le paysan du Danube, pensa Deloraine.
Il se rasséréna peu à peu devant l’arrivée en grande pompe du lapereau sauvage et de l’herbier de Provence aux quatorze parfums de la garrigue. La conversation bon enfant de sa voisine de gauche acheva de le réconforter. Cette dame entre deux âges faisait partie des habitués. On la dénommait la « comtesse » non en vertu d’une quelconque ascendance nobiliaire, mais parce qu’elle portait des bandeaux bleus, des colliers de perles soutenus et que son premier mari s’appelait Monsieur Ségur. Au demeurant bavarde et chaleureuse, capable de meubler la conversation sans qu’on soit obligé de lui faire systématiquement la réplique.
Ses propos tournèrent sur la reconversion des femmes modernes dans la magistrature, les prochaines élections cantonales qui nous préparaient un beau rififi, et la cuisine du terroir dont elle se disait plus experte que certains professionnels habitués du journal de France 3. A la fin, peu de temps avant le dessert , elle aborda aussi la question de la religion, ce qui suscita d’abord un léger frémissement tout autour de la table. Il fut suivi d’un brouhaha plus vif car la comtesse raconta à la cantonade ce que lui avait confié un bonze coréen : que dans la vie il fallait prier au moins trois fois. La première, quand on va au bord de la mer. La deuxième, quand on est sur le champ de bataille. La troisième, à la mairie avant d’entrer dans la salle de mariage. Ce qui fut accueilli avec une énorme explosion de bonne humeur et faillit déclencher la mise en route d’un tapage bourguignon.
Ce fut le moment précisément choisi par les marmitons costumés pour envahir en courant la salle de restaurant, munis de chariots à desserts qui ressemblaient à de grosses catapultes vertes et roses, nappées de chocolat, de nougatines, de pâtes d’amande, de fruits tropicaux, et de coulis si mirifiques que pendant quelques minutes, ce fut autour de la table comme un pandémonium de fin d’empire qui rappela à Jean les exploits du sénateur Gambrinus. Les chariots de desserts furent si sérieusement mis à mal que Troisfontaines lui-même, en cabotin expert et vaguement vachard, vint demander aux commensaux si le bouquet final avait suffi.
Le soleil avait déjà beaucoup baissé quand on s’aventura hors de la salle du restaurant. Jean se sentait ramolli, recru. Il jeta un œil aux vouivres de pierre qui crachaient l’eau avec une impudeur tranquille. Comme il se préparait à filer à l’anglaise, il s’entendit interpeller par la comtesse.
– Eh Deloraine, vous êtes libre samedi prochain ?
– C’est que...
– Ta, ta, mon bon ami. Je vous ferai goûter mon foie gras maison. Et vous verrez : on est jamais si bien servi que par soi-même.
Deloraine aurait voulu lui dire qu’il n’était par principe pas favorable à cette idée qu’on pût gaver les oies en vue de nos menus plaisirs. Elle ne lui en laissa pas le temps, s’engouffrant dans le mini-bus avec une vélocité déconcertante. Il se sentit soudain fataliste et se remémora une phrase énigmatique que l’on prêtait au poète Pouchkine :
« La vie pour finir, n’est qu’une longue suite de dîners. »
Jean Libis.
Jean Libis est un écrivain philosophe né en 1944. Il enseigna la philosophie au lycée Carnot à Dijon et a publié de nombreux récits et romans, ainsi que des essais sur Gaston Bachelard. Il a publié de nombreux ouvrages dont :
* Gaston Bachelard ou la solitude inspirée - Essai, Berg international, 2007.
* L'Eau et la Mort. Essai, éditions universitaires de Dijon, 1993.
* Le Mythe de l’androgyne. Essai, Berg international, 1980.
* L’Alsace, une inquiétante étrangeté - Récits-Essais - Les éditions spéciales (Patricia Lasserre), 2021.