Né en mai 1896 dans la Nièvre et mort le 31 mars 1990 à Paris, Louis Lanoizelée fut successivement domestique de ferme, mineur, maître d’hôtel, écrivain et surtout bouquiniste !
Issu d’une famille d’ouvriers mineurs de La Machine (*), Louis Lanoizelée passa une partie de son enfance chez ses grands-parents maternels. En 1905, il vint rejoindre ses parents qui, à cette époque, habitaient Paris dans le XIVe arr., et fréquenta l’École communale rue d’Alésia. Après avoir obtenu son Certificat d’études primaires en 1908, il trouva un emploi de facteur bouliste aux PTT, rue de Grenelle ; mais, en 1910, revint avec ses parents à La Machine où il travailla d’abord comme domestique dans plusieurs fermes. Il fut apprenti charron pendant cinq mois avant d’être embauché, en 1912, à la Compagnie des Mines, la houillère de La Machine ayant été rachetée en 1864 par la firme Schneider du Creusot. Adhérent à la CGT, mais trop jeune encore pour militer, dit-il, il demeura à la mine jusqu’en août 1915 et, le 15 de ce mois, il fut mobilisé au 10e Régiment d’Infanterie à Auxonne (Côte-d’Or). Démobilisé le 25 septembre 1919, il sortit de la guerre « avec une horreur farouche, confiera-t-il, d’avoir un fusil dans les mains, même pour aller à la chasse ». En 1920, il se retrouva manœuvre à la mine, et se maria, le 17 septembre 1921, avec Pauline Leblanc. Il quitta de nouveau son pays natal, s’engagea comme domestique à Pont-de-l’Arche (Eure), et, l’année suivante, trouva un emploi de maître d’hôtel à Paris, rue du Cherche-Midi, dans lequel il resta quatre ans. En 1928, il revint à La Machine, y exerça le métier de charretier pendant un an, puis reprit un poste de maître d’hôtel à Paris, rue de Varennes. En 1930, naquit sa fille Jeanne. Dès lors, Lanoizelée ne quitta plus Paris. Infatigable lecteur, il commença une collection de livres et habitué des quais, il s’établit, en 1935, bouquiniste quai des Grands-Augustins et habita rue Gît-le-Cœur.
(*) La machine : Cité minière située non loin de Decize dans la Nièvre (58260). Des milliers d’hommes, durant plus de 200 ans, ont œuvré au péril de leur vie pour extraire la houille, et ce, afin d’offrir le combustible nécessaire à chauffer les foyers et faire tourner les usines. Son but : sécuriser l'approvisionnement en coke pour les aciéries du Creusot.
Cette ville au passé récent et minier se situe non loin de Decize. Son nom, elle le doit à un manège à chevaux, utilisé pour remonter les mineurs.
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Louis Lanoizelée publia un premier article en 1931 (consacré à Pierre Loti) dans le Mercure de France. D’autres suivirent, à partir de 1936 - récits, contes, biographies — dans divers périodiques : Le Peuple, L’Émancipation Paysanne, Les Cahiers Bourbonnais, etc... Lanoizelée se lia avec Henri Pitaud, Henry Poulaille, René Bonnet, Ferdinand Teulé, Maurice Lime, Maurice Pernette, et d’autres écrivains comme Édouard Peisson, Daniel Halévy, Émile Guillaumin ou Marguerite Audoux à laquelle il rendit régulièrement visite jusqu’en 1937, année de sa mort. Il accumula des notes qui lui servirent, au cours des années suivantes, à rédiger de précieuses biographies publiées à compte d’auteur sur Émile Guillaumin, Charles-Louis Philippe, Lucien Jean, Gaston Couté, Marguerite Audoux.
Parallèlement, avec patience, il rechercha les documents qui lui permirent d’écrire deux monographies d’un exceptionnel intérêt : la première, Les bouquinistes des quais de Paris, parue en 1956 (ouvrage qui fut couronné par l’Académie Française !) retrace avec force détails l’histoire de cette corporation dont la Chambre syndicale avait été reconstituée, après bien des difficultés dues à l’occupation allemande, en 1943, sous la présidence d’honneur de Georges Duhamel, et dont Lanoizelée avait été élu secrétaire. La seconde, La Machine et sa Houillère, parue en 1964, et pour laquelle il obtint le Prix de L’Aiguillon (1966), était une étude fouillée, historique et ethnographique à la fois, de La Machine, de son industrie et de la vie ouvrière dans ce centre houiller du Nivernais. Puis fut publié Souvenirs d'un bouquiniste, aux éditions L'Âge d'Homme en 1978. Jusqu’en1977, il exerça son métier, l’hiver comme l’été, au bord de la Seine, face au n° 27 du quai des Grands-Augustins.
© Jean Prugnot – Le Maitron.
- Bouquinistes des Quais de Paris - Préface de Daniel Halévy et avec des bois gravés de Jean Lébédeff -
Diverses considérations sur le métier de bouquinistes à Paris. Y sont convoqués, Balzac, Anatole France et Rémy de Gourmont évoquées par le libraire Bruno Lalonde (Canada). Durée : 30mn.
Publication récente :
Amis lecteurs et bibliophiles, je vous recommande cet ouvrage pour la fraîcheur de son propos et la qualité des illustrations. L’académicien Jean Marie Rouart ne s’y trompe pas « Les bouquinistes : l’âme de Paris » écrit-il en tête de sa préface. Cela est si vrai ; osons ainsi espérer que cette tradition perdure encore de nombreuses années.
Le Paris des bouquinistes, par Alexia Delrieu et Albert Abid. Éditions La boîte 29 - Juin 2024 - 96 pages - Format : 203 X 2014 – Nombreuses illustrations et documents. - ISBN 978-2-9583280-4-7 Prix : 20 €.