BAGET François
« Virgine ou la ville dessous la terre »
Editions Lettres du Monde – Paris – 2002 – ISBN 2-7301-0164-0
Résumé :
Nous sommes en l’an 2101… Le monde est dirigée par la toute puissance américaine avec l’union de pays vassaux. Suite aux tragiques événements de la révolution II dans les années 2091, s’est installée dans les pays les plus civilisés une « Police de la Pensée ». Son rôle ? Contrôler ce que pense chaque Citoyen-Sujet sachant que le bonheur est obligatoire pour tous.
Devant l’évolution de cette méga-société s’est construite à la fin du XXème siècle une grande ville souterraine, ville refuge, du nom d’Halgadom. Cette cité du dessous garde le contact avec l’extérieur grâce aux « Eclaireurs » qui régulièrement font surface.
Virgine Massarov, née sous terre, fera-t-elle partie de la prochaine mission ?
Un roman entre le merveilleux et le tragique, ou peut-être tout simplement une interrogation nécessaire…
Ouvrage disponible (sur commande) dans toutes les bonnes librairies, ou, sur simple demande, à la librairie Heurtebise…
Pensez à offrir un livre en cadeau avec une dédicace de l’auteur !
L’auteur envisage d’écrire une « suite » : Retour vers la Maison-Mère…
A suivre…
Critiques :
« Avec quelques références apocryphes l’auteur sème des graines au détour de certaines pages qui pourraient donner naissance à quelques mythes nouveaux… C’est l’histoire d’un combat contre le politiquement correct. Dans ce récit que n’aurait pu renier Jules Verne, il y a du Kafka, des traces de Beckett et quelques pincées de Ionesco. »
Franck Bassoleil – Le Bien Public – 26 Décembre 2002.
« Virgine envoyée en mission à la surface de la terre, va pouvoir comparer ce qu’elle y trouve avec le monde sous-terrain qui est le sien. Il faut suivre avec confiance l’héroïne au cours de ses pérégrinations, mises en scène avec talent par François Baget. Vous ne regretterez pas un instant cette exploration d’un futur peut-être hélas, si proche ».
P. Vial – Terre et Peuple – N° 15 – 2003.
« La science-fiction française réserve rarement d’aussi bonnes surprises que ce roman qui, en fait, relève plutôt de l’anticipation, dans la lignée d’Orwell et d’Aldous Huxley…Une lecture passionnante de bout en bout, avec un sens de l’action remarquable, des personnages vigoureusement campés, de courtes digressions particulièrement bien venues (sur l’art contemporain), et de beaux moments de poésie, comme lorsque Virgine, l’un des trois « éclaireurs », découvre pour la première fois la caresse du vent, la douceur de la terre et la couleur du ciel… »
Michel Marmin – Eléments – N° 109 – Juillet 2003.
Pour lecture, voici le premier chapitre :
10 Mars 2101, sous Terre.
L'ascenseur descendait rapidement dans le long tuyau noir qui menait à la Zone "des Espérances". Seule une petite lumière répandait dans le minuscule espace un halo diaphane. Il était 13 heures et 28 secondes (selon le méridien de Paris). Le léger sifflement de la cabine indiquait la bonne marche de l'ascenseur. Deux hommes étaient l'un contre l'autre. Leur respiration, lente et régulière n'indiquait aucun stress particulier. Il s'agissait de deux Officiers de Liaison, en mission, qui livraient la malle-courrier.
Chaque jour ils apportaient les plis, messages, et documents variés au Bureau de l'Information de la Zone B.
Comme d'habitude la réceptionniste dans sa cage de verre leur tendit le stylet numérique de signature des bordereaux de livraison, leur adressa le parfait sourire de convenance de même classe et replongea sa tête blonde dans le scripteur.
A cet instant précis la porte coulissante de l'Espace-Accueil pivota et laissa entrer Bronaer.
Georges Bronaer était le Premier-Secrétaire de la Base-Vie. Toujours avec dynamisme et jovialité il entra et lança un grand bonjour. Cet homme de quarante-cinq ans, à l'aspect soigné régissait et contrôlait le Secrétariat de la Ville sous Terre et on lui reconnaissait une qualité majeure, une joviale sympathie.
Au même instant par l'autre porte-sas pénétra le professeur Paul de Boyer. Les deux hommes se saluèrent de la tête plus par habitude que par civilité.
La secrétaire releva son fin visage, son regard clair au dessus des lunettes et dit :
"Professeur... un message urgent. Je viens de le recevoir à l'instant : la dernière Mission arrive bientôt."
Le logo"doigt sur les lèvres" voulant dire Top-Secret était collé sur le papier.
Paul de Boyer prit l'enveloppe avec grâce, comme d'habitude et la glissa dans sa poche.
Les deux convoyeurs s'en allaient par le même chemin. Bronaer lança plus par amusement que par réflexion :
- Tiens, un message de la Terre! Ils ont peut-être un problème là-haut...
- Vous savez, mon cher, un problème, comme vous dites, c'est jamais bon à prendre. De la méfiance, beaucoup de méfiance...
- Professeur... J’ai entendu dire, il y a quelques jours que le N.O.M. (Nouvel Ordre Mondial) avait décidé de mettre en application des Tests de la Pensée dans la région nord-est. Avez-vous des informations sur ce sujet ?
- Oui, quelques informations... Ces Tests sont de plus en plus courants actuellement, surtout dans la zone d'Europe-Occidentale. Vous savez, Bronaer, ils les ont conçus pour que chaque Citoyen-Sujet puisse faire son autocritique. Les premiers "Examens de Conscience" avaient été lancés pendant la Révolution II de l'an 2091, rappelez-vous!
Le Professeur machinalement reprit l'enveloppe dans sa poche et l'ouvrit en employant la fermeture de sécurité. Ce message était envoyé par le groupe d’Eclaireurs en Mission pendant leur voyage de retour quelques heures avant l'arrivée à la Ville dessous la Terre. Il sortit un petit papier de couleur bleu sur lequel était écrit simplement ces quelques mots :
"La Mission Copernic est un succès. Arrivée dans environ douze heures. L.V.K est avec nous + un intrus. (?) A bientôt."
"Un intrus ?" pensa intérieurement le Professeur en fronçant les sourcils.
" Tenez Bronaer, dit il en lui remettant le message, un nouveau Visiteur-Réfugié va arriver bientôt chez nous... enfin deux! Des Tests dites-vous ? Ils ont bien commencé! En voici la preuve."
Georges Bronaer à la lecture de ce simple courrier comprit vite ce qu’ il allait se passer...
-o-o-o-o-o-o-o-
Pour lecture, voici le dernier chapitre :
C'était maintenant le retour.
Le Mobil-Home-Car reprit la destination des grottes de Bèze. Il était convenu que la troupe des Eclaireurs partirait en milieu de nuit. John aidé de René prépara le matériel. L'ensemble était rangé dans la soute du véhicule. Vérifier les scaphandres, les bouteilles d'oxygène, règler les masques, préparer les tenues pour Pierre. Tout cela demandait beaucoup d'attentions. Virgine prit le temps d'expliquer à Pierre l'itinéraire du voyage sous la terre. Il ne connaissait pas cette Porte. Elle prit le temps de lui montrer, avec les cartes et relevés topographiques le périlleux chemin qu'il emprunterait. La rivière souterraine qui disparaît dans un étroit boyau, le passage de plusieurs siphons, retrouver le fil d'Ariane et les témoins phosphorescents. Passer soixante-quinze heures dans l'eau et le reste dans l'humidité. Dormir, enfin se reposer, accroché à une paroi. Ne pas se perdre. Ne pas désespérer...
Pierre semblait être suffisamment en forme pour affronter le voyage. Et puis Virgine l'aiderait. Il savait maintenant qu'il pourrait compter sur elle. Elle entrait dans sa vie...
La jeune fille lui proposa de faire le tour du site de la source. Ils partirent, comme deux enfants, l'un contre l'autre. Les grands arbres balançaient leurs fines branches au-dessus de l'eau comme de grandes pattes d'araignée et des colonies de canards se disputaient quelques vers avec deux majestueux cygnes. Là-bas jaillissait la source. Une eau vert émeraude tumultueuse sortait en gros bouillons. Ils montèrent le petit chemin et s’appuyèrent sur la vieille rambarde qui surplombe le spectacle. Virgine approcha son visage du sien. Son regard prenait une expression d'immensité et ses yeux bleus fixaient le flux incessant de l'eau. Pierre ne disait rien. Il prit Virgine doucement dans ses bras. Elle était souple s'abandonnant contre lui. Sa respiration se fit plus rapide. Elle fermait les paupières à demi et souriait légèrement dans le soir.
Caressant ses cheveux, Virgine articula :
"Pierre, quel bonheur que tu sois maintenant là, avec moi. Avec nous."
Ils s'embrassèrent lentement. Leurs coeurs étaient en accord avec l'harmonie du monde.
Ils s'en retournèrent.
Aux abords de l'abri-sous-roche qui donne dans la grotte, montait de la source un brouillard laiteux. Une bouche noire, grande ouverte, semblait leur dire :
"Entrez, entrez, enfants de la Terre, venez rejoindre les vôtres. Il se fait tard maintenant pour rester dehors" !
Le Mobil-Home-Car s'estompait doucement dans le soir. Les Eclaireurs avaient terminé leurs préparatifs. Ils attendaient la nuit et mangeaient en silence autour de la petite table.
Arno calculait dans sa tête le nombre de Missions qu'il avait pilotées. Sylvia, si gentille, pensait à ce qu'ils n'oublient rien. Les six Eclaireurs étaient fiers d'être ensemble.
René rompit le silence et demanda à Virgine ce qu'elle retenait de ces quelques jours sur terre.
" Le soleil, répondit-elle, sans réfléchir. La lumière et le soleil ! Ca, je ne l'oublierai jamais..."
Maintenant la nuit s'était installée. Il faisait frais. Un peu au loin on devinait à travers la végétation quelques lumières provenant du village. Le bruit vague au loin d'une voiture, l'aboiement d'un chien, le murmure de la source.
Pour des raisons de sécurité les adieux se firent dans le Mobil-Home-Car. Arno avait discrètement ouvert la grille d'accès à la grotte, il en possèdait un jeu de clés. Alors ce furent les embrassades. Sylvia et Arno avaient toujours ce sentiment âpre au goût de cendre dans la bouche quand une Mission retournait sous Terre. Ils se serrèrent la main. La paume de la main droite contre main droite. Ammonite contre ammonite, comme le veut le rituel de l'Ordre.
Se reverraient-ils pour une prochaine Mission ? Peut-être.
Alors les quatre Eclaireurs enfilèrent leurs combinaisons étanches, fixèrent sur leurs épaules l'imposant matériel et descendirent du véhicule. La petite place devant la grosse bouche noire était calme et déserte. Ils partirent l'un derrière l'autre.
Virgine se retourna vers le Mobil-Home-Car et agita une dernière fois la main.
Alors à cette heure de la nuit, elle leva les yeux vers le ciel et embrassa d’un dernier regard la voûte céleste, puis se retourna et d’un pas décidé descendit la pente qui glissait vers la grotte.
FIN